Noé fait alliance - Aller plus loin

L’alliance appartient à l’expérience sociale et juridique des êtres humains, qu’il s’agisse d’un pacte d’amitié entre deux individus, d’une alliance de paix ou de coopération entre deux clans, ou d’un mariage. Chacun des partenaires doit respecter les droits et les devoirs qui découlent de l’alliance en faisant preuve de loyauté et de fidélité.
Le traité de vassalité est un type d’alliance qui se distingue des autres. Il peut être considéré comme l’ancêtre de nos traités internationaux modernes. Le traité de vassalité est établi la plupart du temps entre le roi d’une nation puissante (la partie suzeraine) et celui d’une petite nation (la partie vassale). La partie supérieure s’engage à protéger la nation plus faible. Mais celle-ci doit faire montre de loyauté envers la puissance alliée, notamment en ne faisant pas alliance avec les ennemis de son suzerain.
C’est sur cet arrière-fond de contrats individuels et sociaux, et de traités de vassalité, que se développe la notion biblique d’alliance pour exprimer la relation privilégiée qui unit le peuple d’Israël à Dieu. Nous avons ici un cas unique dans tout le Proche-Orient ancien. Comme dans les traités de vassalité, Dieu exige d’Israël une allégeance exclusive et une fidélité absolue. Ces exigences ne sont pas limitées au seul domaine religieux. C’est dans toutes les sphères de la vie qu’Israël doit se comporter comme le peuple qui appartient à Dieu. On comprend alors un peu mieux l’ardeur avec laquelle certains prophètes ont combattu, mais en vain, les projets d’alliance avec des nations voisines, plus puissantes, pour se défendre contre les agresseurs. Les prophètes considéraient que ces pactes étaient ni plus ni moins que la rupture de l’alliance avec Dieu, le seul protecteur d’lsraël. C’était en réalité revenir à l’esclavage que les ancêtres avaient connu jadis en Égypte et duquel Dieu les avait libérés.
L’enseignement des prophètes ouvre la notion d’alliance -jusque là fort juridique- à une dimension plus humaine. En comparant l’alliance à la relation conjugale, ils introduisent l’amour comme base de l’alliance ou de la relation entre Dieu et Israël. C’est par un acte d’amour, libre, gratuit et généreux, que Dieu a choisi Israël parmi toutes les nations pour être témoin de son agir dans le monde. En retour, Israël doit répondre par un amour tout aussi généreux et total.
Cet approfondissement de la notion d’alliance prépare la voie à la nouvelle alliance conclue en Jésus Christ. Jésus ressuscité réalise l’union irréversible que Dieu a voulu établir entre lui et l’humanité. (Yves Guillemette)