La théologie, il faut qu’on en parle ! - Contexte
La théologie n’est pas une science solitaire. Le théologien cherche le débat avec d’autres théologiens, mais aussi avec d’autres chercheurs en histoire, en philosophie, en éthique. Il ne peut pas, tout seul à son bureau, élaborer des thèses, mais il doit être à l’écoute de ce que d’autres disent de Dieu, de l’être humain et du monde. Ses convictions s’éprouvent dans le débat, dans la discussion et parfois même dans la dispute. Ainsi, la dispute théologique fait partie intégrante du travail du théologien. La vérité n’est pas directement accessible, et le débat permet de le signifier.
Comment se fait-il qu’une formulation théologique change au cours des siècles, alors que les textes bibliques de référence restent les mêmes ? Ce changement est bien souvent le fruit d’une expérience individuelle ou communautaire. Certains parleraient d’une expérience spirituelle, d’autres mettraient en avant une situation particulièrement heureuse ou malheureuse qui fait qu’il y un avant et un après : on ne peut plus parler de Dieu de la même manière qu’on le faisait auparavant. Dans la multiplicité des témoignages bibliques, certains textes prennent subitement du relief, parlent et indiquent un sens nouveau, alors qu’ils ne parlaient pas avec la même intensité auparavant. Il faut alors revoir sa théologie, reformuler à partir de ce changement.
Parler de Dieu n’est pas anodin ! Le discours théologique, comme tout discours qui aborde des questions fondamentales de la vie, de son sens, de son orientation, a des conséquences. Il n’est pas indifférent d’affirmer que Dieu rencontre l’être humain comme le « tout-autre », le « tout-puissant » ou encore « incarné » dans l’homme Jésus de Nazareth. Les conséquences d’un certain discours sur Dieu varient certes d’un croyant à un autre, mais elles sont là. Dire que Dieu est « tout puissant » pose ainsi immédiatement la question du mal et du malheur dans le monde. Dire que Dieu est amour peut être libérateur pour l’un (qui enfin rencontre quelqu’un qui l’aime sans condition) comme il peut être culpabilisant pour l’autre (qui imagine devoir aimer « à l’image de » cet amour inconditionnel). Le théologien doit donc non seulement être attentif à ce qu’il dit de Dieu, mais encore aux conséquences que son discours peut avoir.
La théologie est un discours humain, et donc du langage humain. S’il est incontournable pour transmettre des expériences, des convictions sur Dieu, il est évident que le langage, que les mots ne peuvent pas « tout dire ». Dieu, même incarné en Jésus Christ, dépasse ce que les croyants peuvent en dire. Le théologien est conscient de cette tension : ses mots sont à la fois nécessaires, mais insuffisants pour dire la réalité de Dieu. Ainsi, la théologie reste une approche de Dieu mais ne peut pas prétendre en avoir « fait le tour ».
En France, il n’est pas habituel que l’Etat fasse appel aux religions pour connaître leurs idées ou positions à propos de questions de société. Dans d’autres pays, cet appel aux théologiens est bien plus habituel. Ainsi, en Allemagne, des politiques s’invitent très naturellement dans la journée nationale des Eglises protestantes (ou/et catholiques), le Kirchentag, pour participer aux débats et contribuer aux tables rondes qui ont lieu à propos de questions diverses, souvent éthiques. En novembre 2014, le pape a été invité au parlement européen pour parler aux délégués des différents pays. Il n’a pas parlé en tant que représentant de l’Etat du Vatican, mais en tant que pasteur : « En m’adressant à vous aujourd’hui, à partir de ma vocation de pasteur, je désire adresser à tous les citoyens européens un message d’espérance et d’encouragement. »