Christologie - Contexte

La lettre aux Philippiens

Quand Paul écrit la lettre aux Philippiens il est en captivité (Philippiens 1,7). C’est essentiellement une lettre d’exhortation à vivre suivant l’Evangile et de remerciements pour l’aide que les Philippiens ont apportée et apportent encore à Paul. Mis à part quelques pointes lancées dans le chapitre 3 contre les « mauvais ouvriers », « les ennemis de la croix du Christ », il n’y a aucune trace de polémique dans cette lettre. Les Philippiens ne se sont pas détournés de l’Evangile annoncé par Paul. Les exégètes s’accordent majoritairement pour dater la lettre aux alentours de l’année 55.

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Paul à Philippes

Quand Paul écrit aux Philippiens, la communauté existe depuis 5 ans. Elle a été fondée par Paul, Silas et Timothée venant de Galatie et allant en Europe. C’est la première communauté pagano-chrétienne fondée en Europe. En effet, la ville de Philippes était devenue une colonie militaire romaine sous Auguste et les citoyens avaient le droit de s’administrer eux-mêmes. Il n’y a pas de synagogue, même si une toute petite communauté juive y vit. Les quelques noms cités dans la lettre : Epaphrodite (2,25 et 4,18), Evodie, Syntyché et Clément (4,2) sont tous des noms romains hellénistiques. La description que donne le livre des Actes L'auteur de ce livre est l'évangéliste Luc, rédacteur du 3e évangile (Evangile de Luc). Luc y raconte la vie des premières communautés chrétiennes, après la mort et la résurrection de Jésus, pour fortifier dans leur foi les communautés nées de la proclamation de l'Evangile aux nations païennes.* de la communauté chrétienne de Philippes donne une idée sans doute exacte de sa composition d’anciens païens La TOB a choisi de traduire le mot grec qui signifie « nation » (ethne, racine que l’on retrouve dans « ethnique ») par « païens ». Certaines traductions parlent de « gentils » du latin gens signifiant « nation ».*.

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Terminologie paulinienne

L’expression « en Christ » ou « en Jésus Christ » est une expression propre à la théologie paulinienne. On ne la trouve sinon que 3 fois dans la première épitre de Pierre. C’est une formule très ramassée par laquelle l’apôtre traduit le lien vital qui relie le croyant Dans le cadre du module sur la théologie de Paul, la dénomination « croyant » a le sens que lui donne Paul dans ses lettres. Il emploie ce terme pour désigner les personnes qui croient en Jésus Christ, et donc les membres de l’Eglise.* et le Christ et qui affirme de ce fait son salut :

Romains 6,23 le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle en Jésus Christ, notre Seigneur.

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La foi en l’Evangile ou de l’Evangile

Dans la langue grecque, la construction grammaticale utilisée par Paul dans les expressions « foi en l’Evangile » ou « foi en Christ », comporte une ambiguïté. On peut tout aussi bien traduire « foi du Christ », « foi de l’Evangile » que « foi en Christ » et « foi en l’Evangile ». La même expression indique ainsi un double mouvement dans cette relation de confiance, de foi : d’un côté la foi du Christ en un Dieu qui sauve et de l’autre la foi de l’individu au Christ. Croire en l’Evangile n’est donc pas le résultat d’une attitude intellectuelle qui serait adhésion à une doctrine, mais bien celui d’une rencontre existentielle avec la personne du Christ. La foi est le mouvement de Dieu vers l’homme par la venue du Christ et en réponse le mouvement de l’homme vers Dieu par la confiance qu’il met en Jésus Christ. L’expression « être trouvé en Christ » prend alors le sens d’être trouvé dans la foi du Christ, et donc d’être sauvé par la foi du Christ. C’est ce que Paul dit un peu plus loin dans sa lettre aux Philippiens :

Philippiens 3,8 Mais oui, je considère que tout est perte en regard de ce bien suprême qu’est la connaissance de Jésus Christ mon Seigneur. À cause de lui j’ai tout perdu, et je considère tout cela comme ordures afin de gagner Christ et d’être trouvé en lui, non plus avec une justice à moi, qui vient de la loi, mais avec celle qui vient par la foi (au) du Christ, la justice qui vient de Dieu et s’appuie sur la foi.

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La fin des temps

Le discours sur la fin des temps que l’on appelle aussi « discours eschatologique » est indissociable de ce que l’on affirme sur Dieu, du « discours théologique ». Dans ses lettres, le discours eschatologique de Paul va évoluer pendant le temps de son ministère. Ainsi, dans sa première lettre connue, la première aux Thessaloniciens, Paul parle d’un retour imminent du Christ, alors que dans la lettre aux Romains, ce retour du Christ est attendu pour « la fin des temps », c’est-à-dire pour un temps indéterminable.

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Paul et Jésus

Les lettres de Paul sont les plus anciens témoignages écrits sur la personne de Jésus conservés dans le Nouveau Testament. Puisque Paul n’a pas rencontré ni connu le Jésus historique et qu’il ne reprend pas la tradition de ses paroles et de ses actes, comme le feront les auteurs des évangiles, la question de sa fidélité au message et à la personne de Jésus se pose. Les évangiles proclament un Jésus qui est venu annoncer la proximité du Royaume de Dieu, Paul prêche la mort et la résurrection de Jésus comme événement de salut. Paul interprète l’événement Jésus, sa venue, sa mort et sa résurrection comme la parole ultime de Dieu pour l’humanité. Dans les évangiles Jésus donne de son ministère la même signification : ses paroles et ses actes manifestent de façon décisive le projet de Dieu. Les évangiles et Paul se retrouvent donc dans une même conception de Dieu, qui est le Dieu de l’Alliance, méconnu et rejeté, qui en Jésus vient pour le jugement, mais un jugement qui prend à contre-pied la pensée religieuse puisque la sentence est une parole de grâce.

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Servir

Dans l’Ancien Testament, la notion de service est très importante. C’est le leitmotiv des livres de l’Exode et du Deutéronome. Le peuple d’Israël est appelé à servir Dieu, à devenir son serviteur. En hébreu comme en grec, ce mot se traduit aussi par « esclave ». Etre serviteur de Dieu signifie donc avant tout dépendre complètement de lui, tout en attendre. L’être humain est placé devant un choix : soit il sert Dieu, soit il reste esclave des idoles. Servir Dieu c’est donc être libre. Dans les chapitres 40 à 55 du livre d’Esaïe, le serviteur est une figure que l’on ne peut plus rattacher à une seule personne bien déterminée. Dans les chapitres 44 et 45, il est le roi perse Cyrus, mais ailleurs il reste anonyme. Dans les chapitres 52 et 53, Dieu appelle « mon Serviteur » un homme souffrant, rejeté par tous, portant les fautes du peuple, mais qu’il relèvera et justifiera. Les premiers chrétiens ont interprété la passion de Jésus à la lumière de la figure de ce « Serviteur souffrant ». Dans cette hymne de Philippiens 2,6-11, la condition de serviteur ne fait pas explicitement référence au serviteur souffrant. Notamment, il n’y est pas fait mention de la souffrance ni de porter le poids des fautes. L’insistance porte surtout sur le service en lien étroit avec l’obéissance, la conformité à la volonté de Dieu. Paul se désignera lui aussi comme serviteur, esclave du Christ et appelle les chrétiens à vivre librement en étant esclaves (serviteurs) de Dieu.

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Les différentes manières de parler de l'incarnation

Les récits des évangiles de Matthieu, Luc et Jean, tout comme cette hymne, suivent une logique narrative temporelle, allant de l’incarnation à la mort et résurrection, en passant par la vie de Jésus. Pourtant la foi répond à un mouvement inverse : c’est la résurrection de Jésus qui est à l’origine de toute expérience croyante comme de tout discours théologique. Les premiers récits qui ont dû circuler étaient les récits de la Passion. La résurrection est le signe que ce Jésus crucifié, abandonné de tous, est l’élu de Dieu. Ensuite les évangélistes ont mis en récit cette élection de différentes façons, en l’intégrant dans le schéma temporel des évangiles. Dans l’évangile de Marc, elle est révélée au baptême de Jésus :

Marc 1,9-11 tu es mon Fils bien aimé, il m’a plu de te choisir. et dans les évangiles de Matthieu et Luc à l’annonce de la venue du Christ à la naissance de Jésus (Matthieu 1,18-25 ; Luc 1,39-46). Dans les trois évangiles synoptiques Synoptique vient d'un terme grec qui signifie « voir ensemble » (syn=ensemble et opsis=le regard/la vue). Les trois évangiles selon Matthieu, Marc et Luc sont appelés synoptiques car ils présentent suffisamment de ressemblances pour qu'on puisse les "regarder ensemble".*, l’élection est montrée dans l’épisode de la transfiguration :

Luc 9,35 Celui-ci est mon Fils bien aimé, celui que j’ai élu ; écoutez-le.

Dans l’évangile de Jean, le prologue sert de présentation théologique de tout l’évangile et décrit la venue de la Parole de Dieu dans le monde.

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L'obéissance

Dans les lettres de Paul, l’obéissance a un sens théologique et non pas moral. Elle est quasiment synonyme de foi. L’obéissance de Jésus qui l’a conduit à la mort sur la croix en est l’exemple unique inimitable. L’obéissance que demande Paul de la part des communautés se comprend à partir de sa conception de son ministère. Il établit un lien étroit entre l’annonce de l’Evangile, la connaissance et l’obéissance comme œuvre de Dieu. Il ne demande donc pas que l’on obéisse à son enseignement puisqu’il n’est pas un enseignant, un maître qui apporterait un modèle de conduite à suivre. Il n’a pas la maîtrise de l’obéissance qu’il demande. Il ne peut l’imposer puisque c’est la puissance de Dieu qui est à l’œuvre dans sa prédication. Il ne peut pas punir la désobéissance puisque ce n’est pas à lui qu’il faut obéir. Pour Paul l’obéissance est une réponse à l’appel qu’il a reçu. Il s’agit pour lui d’amener toute personne à « être esclave du Christ », comme il l’est lui, et à dépendre totalement du Christ en vue de la vie. C’est pour cela qu’il demande souvent de l’imiter, lui Paul, quand il parle d’obéissance.

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