Jugement - Espace temps
Le temps qui se déroulerait selon un cycle éternel où toutes les choses se reproduisent est un très vieux mythe de l’humanité. On parle alors d’éternel retour ou encore du recommencement périodique de l’histoire. On retrouve ce mythe (dans sa forme générale) dans les plus anciennes traditions. Chacun de leurs systèmes de pensée est particulier, on y retrouve cependant des constantes. Tout d’abord, le temps cyclique nie l’idée de création, de commencement. La nature y est vue comme immortelle même si sa forme change périodiquement. Le monde est alors dit incréé. Ensuite, le temps cyclique conduit à une absence d’histoire. L’histoire ne peut que relever des constantes dans le comportement des hommes : à l’image de la nature, rien de nouveau ne se crée dans l’histoire. Enfin, le temps cyclique sous-entend la vie comme marquée par le destin. Le monde étant soumis à la fatalité du temps, l’homme cherche à se libérer de son emprise. Les moyens de cette délivrance sont variables selon les traditions et aboutissent à différentes conceptions de la vie.
Dans le judaïsme et le christianisme, on parle du monde comme étant une création de Dieu (Genèse 1). Une telle affirmation a de nombreuses conséquences sur la vision du monde : tout d’abord, si le monde est créé par Dieu, on ne peut le considérer négativement. Le théologien Tillich Tillich adhère au socialisme sous l'effet d'une quasi-conversion, à la suite de la Première Guerre mondiale et de la révolution allemande de novembre 1918. Il commence son enseignement universitaire à Berlin. dira même que le monde est » essentiellement bon « , ce qui veut dire que même s’il est dégradé par le péché, le monde est en lui-même bon. Dans cette perspective, la pensée chrétienne s’oppose au gnosticisme pour qui le monde par nature est opposé à Dieu et intrinsèquement mauvais (la porte de salut consiste alors à s’échapper du monde). Ensuite, si le monde est créé par Dieu, on ne peut diviniser le monde. Sa création implique une différence radicale entre le Créateur et la Créature. Dans cette perspective, la pensée chrétienne s’oppose à tout panthéisme qui consiste à rendre un culte soit au monde en son ensemble soit à des éléments du monde. Enfin, les textes bibliques qui parlent de la création insistent beaucoup sur la parole. » Dieu dit « , affirme la Genèse (Genèse 1) et l’évangile de Jean souligne qu’au début est la parole et que tout a été créé par elle (Jean 1,1-18). Ainsi, la primauté appartient non pas à l’ordre interne du monde, ni à la volonté humaine, mais à la parole de Dieu. Autrement dit, le croyant découvre qu’il n’est pas autonome, qu’il n’a pas la maîtrise de son existence. Calvin français né à Noyon. Il a une formation d'humaniste, étudiant les lettres, la philosophie, le droit, l'hébreu, le grec, la théologie en divers lieux universitaires (Paris, Orléans, Bourges). affirmera même que la création interdit de considérer le monde, la nature ou l’histoire comme le réalité suprême qui commande l’existence humaine. Au contraire, la création proclame la priorité et la valeur ultime de la parole divine : tout vient d’elle et dépend d’elle.
La Bible s’ouvre par le récit de la création. Néanmoins, pour de nombreux théologiens, la création n’est pas nécessairement le point culminant de la foi chrétienne. La plupart constatent que les textes bibliques parlent de la création beaucoup moins souvent que du salut, que les évangiles placent au coeur de leur message la résurrection. A partir des années 80, cette position a été nuancée : on a fait remarquer qu’on ne pouvait guère distinguer dans la Bible création et salut. En effet, quand il créé, Dieu opère une sorte de salut : le récit de la Genèse le montre en train de sauver le monde du chaos. De plus, quand Dieu sauve, Dieu le fait en créant. Prenons par exemple le passage de la mer rouge : Dieu sauve les israélites en séparant les eaux, comme il l’avait fait au moment de la création. Enfin, le Nouveau Testament parle du salut comme d’une nouvelle création, du surgissement d’une nouvelle terre, de nouveaux cieux, et d’un nouvel homme. Dans cette perspective, il y aurait donc similitude, voire identité entre création et salut.
Dans la Bible, on attribue à Dieu la fonction de juge. On peut toutefois relever au moins trois manières de parler de la justice de Dieu.
La première parle d’un Dieu juge en ce sens qu’il punit les méchants et récompense les bons. Dieu possède cette fonction à travers la conduite de son peuple et des individus. Perçu alors comme le Dieu de la rétribution, il établit sa justice dans la perspective du Jugement. Par exemple, dans l’Ancien Testament, on peut célébrer sa justice en termes concrets : tantôt jugement punitif contre les ennemis d’Israël (Deutéronome 33,21), tantôt délivrances accordées au peuple élu (Juges 5,11). Pour le prophète Esaïe, la justice de Dieu déborde cette compréhension juridique : la justice de Dieu devient le salut du peuple captif, la manifestation de sa miséricorde.
Une autre manière d’en parler est de faire de la justice de Dieu une justice qui fait droit aux plus faibles. On découvre alors que la justice de Dieu correspond aussi à un jugement favorable, c’est-à-dire une délivrance, une justification de l’opprimé. Cet aspect favorable de la justice de Dieu est largement représenté dans le livre des Psaumes (par exemple au Psaume 116).
Enfin, on parle aussi de la justice de Dieu en terme de justification du pécheur. Ainsi, dans le Nouveau Testament, Jésus va déplacer le niveau de compréhension de la justice divine. Ce sont les épîtres de Paul qui décrivent le mieux cette nouvelle compréhension : » Dieu montre sa justice dans le temps présent, afin d’être juste et de justifier celui qui vit de la foi en Jésus » (Romains 3,26). La justice de Dieu n’est alors pas celle que Dieu exige de l’être humain, mais celle qu’il lui donne gracieusement, en l’acceptant tel qu’il est et en l’appelant à se confier à lui seul pour son salut. La justice est un don de Dieu, elle reste fondamentalement extérieure à toute volonté humaine et se reçoit dans la foi. Cette justice gracieuse ne se donne jamais une fois pour toute, la justification s’opère sans cesse, le juste demeurant toujours pécheur. La tradition protestante fera de la justification par la foi l’article décisif de la foi.
Le mot « paradis » signifie littéralement « jardin ». Il a longtemps servi à désigner un lieu dans lequel seraient accueillis tous ceux que Dieu déclarera justes. Au cours du Moyen-Age Le Moyen Age occidental est l'époque de l'histoire située entre l'Antiquité et l'Époque moderne, donc grossièrement entre 500 et 1500 après Jésus Christ. Elle s'étend donc sur une période de 1000 ans., la représentation de l’au-delà était d’ordre spatial. A l’image du jardin d’Eden (paradis terrestre perdu), on représentait donc un paradis céleste post mortem. Néanmoins, la description d’un paradis eschatologique reste extrêmement sobre dans les textes bibliques. C’est aussi pour cette raison que les Réformateurs Promoteur de la religieuse du 16e siècle . vont proposer une interprétation plus spirituelle et existentielle des « lieux de l’au-delà ». Luther Réformateur allemand né et mort à Eisleben. Moine, prêtre, docteur en théologie, professeur d'exégèse biblique, il était habité par une intense quête spirituelle concernant le salut. relit alors l’enfer comme la désignation d’une séparation d’avec Dieu, le purgatoire comme la peur que Dieu abandonne l’homme et enfin le paradis comme la communion avec Dieu. Il ne s’agit donc pas tant d’endroits où l’homme irait après le décès mais d’un mode de relation que l’homme vit ici et maintenant avec Dieu. Les Réformateurs ont conscience que les catégories qu’ils utilisent alors ne sont que des images. Elles ne constituent pas un savoir et ne prétendent pas le faire. Elles sont des modes de compréhension.
Compte tenu de la forte imprégnation de l’enfer dans la civilisation dite chrétienne, on pourrait s’attendre à une abondance de référence dans la Bible. Il n’en est rien. Ce thème brille même par sa rareté. Dans l’Ancien Testament, apparaît d’abord la notion de Shéol, lieu des morts que tout à chacun (bons et méchants) connaîtra un jour ou l’autre. Il est situé « dans les profondeurs de la terre » (Psaume 63), est décrit comme le lieu où tout prend fin (ce que constate le livre du Qohélet, voir 9,3-6). L’enfer est une notion qui apparaît plus tardivement car jusque-là, la rétribution du juste et du pécheur a lieu dans la vie. L’expérience montrant bien souvent l’inverse, la rétribution sera attendue après la mort. Du coup, la littérature apocalyptique décrit pour la première fois un enfer éternel (Daniel 12,1-2). On ne peut pas parler d’idée communément admise et les hésitations persisteront longtemps en judaïsme sur l’existence ou non d’un enfer. Dans le Nouveau Testament le thème est tout aussi rare.
Paul n’utilise ce mot qu’une seule fois (Philippiens 2,10) pour signifier un monde souterrain, manière de dire que chacun aura sa rétribution mais sans jamais préciser quel sera le sort des méchants. Les évangélistes utilisent quant à eux cette idée d’un lieu de perdition lié à la justice divine, généralement désigné sous le nom de Géhenne
La géhenne désigne un ravin de Jérusalem où se firent en l'honneur de Moloch des holocaustes d'enfants (2Chroniques 28,3 ; 33,6), profané par Josias (2Rois 23,10), il fut peut-être transformé en décharge publique ; Il devient en tous cas un symbole de malédiction (Jérémie 7,31 ; 19,6) et même de malédiction éternelle dans la littérature apocalyptique. C'est en ce dernier sens que l'emploie le Nouveau Testament et plus particulièrement encore l'évangile selon Matthieu.. C’est dans le livre de l’Apocalypse
Ce livre est attribué par la tradition à Jean, l'évangéliste, car l'auteur se présente avec le nom de Jean. Le texte a probablement été écrit autour de l'an 95 après JC. que le lecteur trouvera une description plus fournie de cette notion.
En effet, c’est à partir de la littérature apocalyptique, que va se développer une conception chrétienne de l’enfer. D’abord reprise de manière populaire, l’idée sera reprise par les Pères de l’Eglise
Dans l'Antiquité, le maître était souvent désigné comme " Père ". De ce fait, ce nom revient aux évêques, mais on étend ce sens de Père à des écrivains reconnus comme témoins de la tradition authentique de l'Eglise.. Au cours du haut Moyen-Age, ce sont les moines qui vont imprimer à l’enfer leurs conceptions les plus imagées et terrifiantes. Enfin, les théologiens de cette époque tentent de rationaliser cet enfer qui finit par devenir dogme, autrement dit un exposé officiel de la foi.
La notion du purgatoire est en germe dès l’époque des Pères de l’Eglise
Dans l'Antiquité, le maître était souvent désigné comme " Père ". De ce fait, ce nom revient aux évêques, mais on étend ce sens de Père à des écrivains reconnus comme témoins de la tradition authentique de l'Eglise.. La dichotomie enfer/paradis semble alors trop brutale et trop radicale. La plupart des croyants, tout en ne méritant pas l’enfer, ne sont pas en état, à leur mort, de jouir immédiatement de la félicité des élus. D’où l’émergence de l’idée d’un temps de purification, de « purgation » des péchés. L’idée s’impose peu à peu et reçoit une impulsion supplémentaire avec le progrès du droit et son exigence de proportionnalité entre les délits et les peines. A la fin du 12e siècle, le purgatoire semble communément admis. C’est au début du 13e siècle que le pape Innocent III « officialise » l’existence d’un lieu de purification pour les pécheurs non damnés. En 1274, le Concile de Lyon en donne la formulation doctrinale.
L’apparition du purgatoire renforce considérablement le pouvoir de l’Eglise dans sa position d’intermédiaire entre Dieu et les hommes (notamment par le système des indulgences). Le purgatoire devient rapidement l’objet de marchandages, dans un circuit commercial lucratif pour le clergé. Ce renforcement du pouvoir de l’Eglise et l’exploitation financière d’une réalité spirituelle sont une des raisons de l’opposition farouche des mouvements de la Réforme. Par ailleurs, les Réformateurs ont nié totalement l’existence d’un purgatoire, jugé sans fondement biblique.
Dans le judaïsme contemporain de Jésus, l’attente du Jugement de Dieu, au sens eschatologique du terme, est généralement admise (même si sa représentation concrète n’est pas uniforme). Au début des évangiles, Jean le Baptiste y fait référence et presse ses auditeurs de se soumettre à Dieu (Matthieu 3,7-12). La prédication de Jésus puis celle des premiers apôtres vont modifier sérieusement les données, puisque -selon une lecture chrétienne traditionnelle- avec Jésus, les derniers temps sont inaugurés : le Jugement eschatologique commence même s’il faut attendre le retour glorieux du Christ pour l’accomplissement final.
Dans les évangiles selon Matthieu, Marc et Luc, l’enseignement de Jésus se réfère fréquemment au Jugement dernier. Ce dernier est évoqué notamment lorsqu’il s’agit d’accueillir ou non la Parole de Jésus (Matthieu 11,20-24). Il en est également question lorsqu’il s’agit des relations envers son prochain. Ainsi dans Matthieu (7/1-5), l’homme sera jugé avec la même mesure qu’il aura appliqué à son prochain. Des thèmes du jugement dernier se retrouvent aussi dans le récit de la mise à mort de Jésus.
Dans l’évangile selon Jean, on assiste à une actualisation du Jugement, au coeur de l’histoire, dès le temps de Jésus. Le Jugement semble se réaliser dès le moment où Dieu envoie son Fils dans le monde : suivant l’attitude que chacun prend à son égard, le Jugement s’opère aussitôt. Ainsi : « Qui croit en lui n’est pas jugé ; qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu » (Jean 3,18). Le Jugement final devient alors un temps où se manifestera au grand jour ce clivage opéré dès maintenant dans la relation à Jésus-Christ.
Des Actes des apôtres à l’Apocalypse, la part belle est faite au Jugement dernier qui invite à la conversion et presse les hommes à l’obéissance de la Loi (Actes 17,31 ; Hébreux 6,1-2 ; Apocalypse 20,12). Dans les épîtres de Paul, une lecture théologique prend forme quant au Jugement. C’est dans son épître aux Romains, que Paul va particulièrement développer l’idée que si tous les hommes sont reconnus coupables devant Dieu et qu’aucun d’eux ne sauraient échapper à son jugement par ses propres moyen, la mise à mort de Jésus donne une autre image de Dieu, celle d’un Dieu qui justifie les croyants. Cette relecture de l’épître par les Réformateurs donnera naissance à leur compréhension du Salut.
Le Nouveau Testament parle de la venue de l’Antéchrist (littéralement « celui qui est contre le Christ ») qui incite des hommes à nier que Jésus est le Christ, manifestant par leur opposition qu’on est entré dans la dernière heure (1Jean 2,18-28 ou 2Jean 7). Sans utiliser le terme « Antéchrist », d’autres textes évoquent une puissance démoniaque qui, jusqu’à la parousie
Le mot parousie vient du grec " parousia " qui signifie " présence, arrivée, venue ". Il se dit principalement du dernier avènement du Christ. du Christ, veut prendre la place de Dieu, séduire les hommes et combattre le Christ (2Thessaloniciens 2,1-12 ; Marc 13,14-23 ou Apocalypse 12-14 et 17).
Ce thème fait partie des conceptions eschatologiques
Ce terme désigne, littéralement, la doctrine de la chose dernière (du grec eschatos, dernier, et logos, discours), ce qui touche à la fin du monde. Israël a toujours été tourné vers l'avenir, et l'Ancien Testament parle de ce temps où Dieu rétablira la justice et la paix. de l’Eglise ancienne et du Moyen-Age. Dans ses écrits, à partir de 1520, Luther identifiera la papauté à l’Antéchrist. Contrairement à l’attente médiévale d’un Antéchrist personnel, Luther ne vise pas la personne elle-même, mais l’institution de la papauté. Selon lui, une double tyrannie en révèle le caractère antichristique : d’une part, elle s’arroge la domination sur l’Eglise à la place du Christ et d’autre part, elle est despotique par le pouvoir qu’elle revendique sur les rois et empereurs (la confusion entre autorité spirituelle et autorité temporelle caractérisant la démarche de l’Antéchrist). L’action de l’Antéchrist détermine toute la vision luthérienne de l’histoire. Cette vision sera reprise (de différentes manières) dans les courants issus de la Réforme et jusqu’à l’aube du 18e siècle, époque à laquelle le thème s’estompera. On retrouvera ce personnage de l’Antéchrist (désormais stigmatisé) dans des courants plus littéraires que théologiques, voire philosophique, notamment avec Nietzsche
Fils de pasteur luthérien, philologue classique de formation, Nietzsche se tourne vers la philosophie pour tenter de formuler les problèmes et de définir de nouvelles valeurs dans le cadre d'un questionnement sur la civilisation. C'est de ce point de vue que, durant la majeure partie de sa carrière philosophique, il met en cause et attaque violemment le christianisme, avec une véhémence toujours plus grande..
Le terme de prédestination vient d’Augustin
Augustin est sans doute le plus célèbre des Pères de l'Eglise. C'est lui qui a laissé l'œuvre la plus abondante, la mieux conservée et qui a produit un héritage important, même si ses héritiers n'ont pas toujours été fidèles à la pensée du maître. : il y a les élus, prédestinés au salut, les autres sont de fait des damnés. Le Réformateur Jean Calvin
français né à Noyon. Il a une formation d'humaniste, étudiant les lettres, la philosophie, le droit, l'hébreu, le grec, la théologie en divers lieux universitaires (Paris, Orléans, Bourges). va exposer quant à lui, une double prédestination : les uns sont prédestinés au salut, les autres sont prédestinés à la damnation. La doctrine de la double prédestination affirme que c’est Dieu qui décide d’avance qui sera sauvé, et Calvin ajoute : qui sera perdu (c’est pourquoi on dit de cette prédestination qu’elle est double).
Ce qui pour un esprit du 21e siècle est ressenti comme une injustice et une négation de la liberté de l’être humain, ne fonctionne pas de la même manière pour l’être humain du 16e siècle. Au contraire : l’idée que tout est joué d’avance fait tomber l’angoisse. Tout d’un coup, la question : « Qu’est-ce que je dois encore faire pour être sauvé ? » n’a plus de sens. La doctrine de la double prédestination dit donc d’abord : tout est fait, on n’y revient plus. Elle s’oppose au système des mérites qui fait croire que l’être humain coopère à son salut, qu’il y est pour quelque chose. La prédestination dit encore autre chose. Elle est en effet souvent liée à un autre terme de la pensée calvinienne : la providence de Dieu. Etymologiquement le mot « providence » vient du latin providere, il exprime la sollicitude de Dieu qui pourvoit au bien de sa création et de ses créatures. Il les protège et les dirige. La providence permet au croyant d’assumer les défis de sa vie en toute liberté, dans une sérénité lucide, conscient des limites qui lui sont imparties, en sachant que l’ultime, y compris ce qu’il ignore est dans la main bienveillante de Dieu.
L’indulgence existe depuis le 11e siècle. Elle certifie la remise d’une peine infligée au pénitent. En effet, après avoir confessé sa faute et reçu l’absolution, le pénitent obtient de l’Eglise l’indulgence. La doctrine des indulgences prend sa source dans la conviction que l’Eglise est l’administratrice du trésor des mérites du Christ et des saints. Elle a donc le pouvoir d’en faire bénéficier les fidèles, moyennant certaines contreparties (Ave Maria, Pater noster, pèlerinages, processions…), et de leur permettre ainsi d’échapper aux peines temporelles imposées pour l’expiation de leurs péchés. Au 16e siècle, on pouvait aussi obtenir rémission de la peine en acquittant une somme d’argent. Or Albert de Hohenzollern, Electeur et Chancelier d’Empire, archevêque de Magdebourg et de Mayence a besoin d’argent ; Rome aussi pour payer la basilique de Saint-Pierre. En 1515, le pape autorise Albert à faire prêcher une indulgence dans ses trois diocèses. Il utilise les services du dominicain Tetzel qui parcourt villes et campagnes, proposant aux foules crédules son sordide marché. Cette vente, et plus encore la fausse doctrine qui prétend la justifier, scandalisent Luther.
Un mouvement apocalyptique marqué par l’idée de la proche fin des temps se développe après 1530 en Hollande et en Allemagne du Nord. Jan Matthys Ce boulanger de Haarlem fut rebaptisé en 1532, se déclara le nouvel Enoch et s'imposa comme chef des millénaristes aux Pays-Bas où il envoya douze apôtres dans les provinces. Parmi ces apôtres, deux se rendirent à Münster en janvier 1534 et vu le succès de leur prédication, Jan Matthys décida d'y établir la Nouvelle Jérusalem. en est un adepte. Il rassemble quelques fidèles et les appelle à inaugurer, au besoin par les armes, le temps de la fin. Ils trouvent un terrain favorable à Münster en Westphalie, ville épiscopale passée à l’anabaptisme L'anabaptisme naît d'une dissidence protestante du 16e siècle. On l'appelle aussi la Réforme radicale.. Jean de Leyde Il est né à Leyde. Il devient tailleur et membre d'une Chambre de rhétorique., chef du mouvement à la mort de Matthys, parvient à y instituer en 1533 un conseil conforme à ses orientations. Une théocratie est établie dans la ville, la communauté des biens et la polygamie sont instaurés, non sans susciter de vives résistances. Une coalition protestante et catholique organise le siège de la ville de Münster. Finalement, la trahison et la famine facilitent la prise de la ville le 24 juin 1535. La plupart des fidèles de Leyde sont massacrés, les meneurs sont torturés et exécutés. Le Royaume de Münster a suscité l’émoi de toute l’Europe et a contribué pour longtemps à déconsidérer les anabaptistes dont la plupart ne partageaient pourtant guère cet illuminisme fondé sur la conviction que ce règne préparait le retour du Christ.
Dans la Bible, ce n’est pas l’homme qui se met en quête de son salut, mais c’est Dieu qui en prend l’initiative et l’accomplit. Les Réformateurs du 16e siècle entendent prêcher cette redécouverte du message biblique. Pour eux, l’interprétation que Paul donne de ce message redevient exemplaire : le respect de la Loi ne permet pas à l’homme d’obtenir son salut, c’est Jésus-Christ qui, par son obéissance totale à Dieu offre aux hommes leur salut. Dieu sait que l’homme est incapable de pratiquer la justice qu’il lui prescrit, Dieu lui pardonne donc ses iniquités à travers son Fils.
Selon Luther, la justice de Dieu est offerte à l’humanité dans la croix et la résurrection de son Fils. Cette justice déclare le croyant juste devant Dieu (Romains 1,17). Ainsi, la justice de Dieu est étrangère et extérieure à l’homme. Dieu n’accepte donc pas l’homme sur la base de ses œuvres justes, mais l’homme justifié est rendu capable d’œuvres justes. Pour Luther, l’affirmation de la justification par la foi seule est la déclaration de Dieu au croyant : « Tu es mon enfant ». Cette déclaration crée une relation nouvelle entre Dieu et le croyant. Elle exprime l’amour que Dieu porte à la personne du croyant et non à ses œuvres.
Selon Calvin français né à Noyon. Il a une formation d'humaniste, étudiant les lettres, la philosophie, le droit, l'hébreu, le grec, la théologie en divers lieux universitaires (Paris, Orléans, Bourges)., devant le Dieu juge, l’homme pécheur ne peut pas se justifier en faisant valoir ses bonnes oeuvres. Mais, parce que le Christ a révélé la miséricorde de Dieu, l’homme pécheur est dit justifié par la foi. La justice issue de la foi n’a plus de rapport avec la justice issue des œuvres : la justice de la foi ne dépend plus de la manière dont l’homme se fait valoir aux yeux de Dieu, mais elle résulte entièrement de la manière dont Dieu regarde l’homme pécheur à travers le Christ. Comme les autres Réformateurs, Calvin souligne : « La justice de foi diffère tellement de celle des œuvres, que si l’une est établie, l’autre est renversée. […] Or la justice est donnée à la foi par grâce (Romains 4,4-5) ; il s’ensuit donc que cela ne vient point du mérite des œuvres ». Néanmoins, si Dieu sauve gratuitement ses élus, il leur donne la foi pour faire des œuvres qui témoignent de sa bonté et de sa gloire.
Du grec « apocalupsis », le mot « apocalypse » signifie « révélation », « dévoilement ». En matière biblique, il sous-entend la révélation du dessein caché de Dieu pour le monde et son avenir. Dans la théologie moderne, on emploie parfois l’adjectif « apocalyptique » au sens d’un substantif, pour désigner non seulement un genre littéraire, mais aussi une vision du monde, voire un courant historique. Cette structure de pensée se trouve dans certains passages des livres prophétiques de l’Ancien Testament (en particulier Esaïe 24-37 ; Ezéchiel 37-48 ; Zacharie 9-14 ; Joël et Daniel 7-12) et dans le Nouveau Testament (Matthieu 24-25 ; Marc 13 ; Luc 21 et bien sûr l’Apocalypse). Elle est caractérisée par six traits principaux :
- il s’agit de discours relatant des visions,
- ces discours périodisent l’histoire et visent à sa fin inéluctable,
- ils exhortent au courage et à la persévérance en des temps difficiles,
- leurs auteurs signent sous des pseudonymes,
- ils utilisent un langage symbolique et chiffré,
- ils se situent en des époques de transition culturelle et donc généralement déstabilisantes.
Le mot Messie signifie en hébreu « celui qui est oint ». Traduit en grec, il donne le mot « Christ ». Dans l’Ancien Testament, le mot » Oint » s’applique avant tout au roi. Souvent sévères pour le roi régnant qu’ils jugeaient infidèle, les prophètes orientent l’espérance de leur peuple vers le Roi futur. C’est à partir de leurs promesses que le messianisme dit royal, se développe. Ils en décrivent par avance la gloire, les luttes et les victoires. Ce Roi futur prend également des aspects sacerdotaux (c’est-à-dire de prêtre). Ainsi, l’eschatologie juive donne une place importante à l’attente du Messie qui préfigurera l’instauration du Royaume de Dieu.
L’espérance juive enracinée dans les textes est extrêmement vive à l’époque du Nouveau Testament. Ainsi, lorsque Jésus vient, certains vont le reconnaître comme étant ce Messie tant attendu. Cette désignation ne va pourtant pas de soi tout au long de son ministère. C’est à la lumière de sa résurrection, que les croyants attribuent à Jésus ce titre de Messie/Christ. En effet, « Ne fallait-il pas que le Christ souffrît cela et qu’il entrât dans sa gloire ? Et, commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliqua dans toutes les Ecritures ce qui le concernait » (Luc 24,26-27). Ces versets inscrivent Jésus dans la lignée de l’attente messianique et le désigne comme le Messie/Christ attendu par les juifs.
Le millénarisme est une doctrine qui prétend que Jésus-Christ règnera sur la terre pendant mille ans. Cette doctrine s’appuie sur une vision qu’on trouve dans l’Apocalypse (20,1-10) et qui décrit ces mille ans de règne. On y trouve souvent un rejet radical de l’ordre social et politique existant. On distingue pré et post millénariste. Le prémillénarisme lorsque situe le règne de Jésus-Christ après la parousie
Le mot parousie vient du grec " parousia " qui signifie " présence, arrivée, venue ". Il se dit principalement du dernier avènement du Christ. (= le retour du Christ). Cette version de la doctrine est bien implantée dans l’Eglise ancienne et revient en force avec le mouvement piétiste
La piété désigne la dévotion, l'attachement aux devoirs et pratiques religieuses, avec une nuance de ferveur dans le langage courant. Ce mot a donné son nom à un courant important qui a touché et marqué fortement le protestantisme : le piétisme.. Le postmillénarisme situe le règne de Jésus-Christ avant la parousie. Le postmillénarisme est adopté par de nombreux puritains
Le puritanisme est un mouvement religieux qui naît en Angleterre sous le règne d'Elisabeth Ière (1558-1603). A l'origine, le puritanisme se proposait de " purifier " l'Eglise anglicane de ses résidus catholiques encore persistants dans les rituels, et de placer la conversion personnelle au centre de la vie commune des croyants. du 17e siècle, puis retrouve des adeptes dans des courants du christianisme social
A la fin du 19e siècle, naît parmi les protestants ce nouveau mouvement théologique qu'est le Christianisme social. La révolution industrielle provoque de telles misères dans les quartiers ouvriers des villes que des pasteurs sont émus et amorcent une réflexion théologique sur la question sociale.. Quant aux Réformateurs
Promoteur de la religieuse du 16e siècle
., ils ont été a-millénaristes : ils ont écarté l’idée du millénium.
Aujourd’hui, le débat théologique tourne essentiellement autour de la question de savoir s’il s’agit d’une image symbolique ou prophétique.
L’histoire du retentissement de l’apocalyptique dans le christianisme est longue et complexe. Au temps de la Réforme, l’apocalyptique a souvent influencé des mouvements dits radicaux (comme l’anabaptisme ou le puritanisme). Mais c’est à travers l’iconographie chrétienne que l’on perçoit le mieux son influence, notamment sur la liturgie, l’art et les mentalités. Souvent déroutante, sa lecture n’en est pas pour autant dénuée d’intérêt. On distingue facilement les dangers de l’idéologie apocalyptique. Le pessimisme quant à l’avenir du monde et le déterminisme historique peuvent sans doute produire chez le lecteur un désengagement et une attente passive que l’intensité des souffrances rend préférables à toute autre forme de résistance. Par ailleurs, une telle conception de la réalité peut aussi provoquer un certain fanatisme aux yeux duquel le monde est irrémédiablement composé de bons et de méchants. Cependant, ce genre littéraire témoigne avant tout d’une grande lucidité. Partant de la constatation évidente que le monde est rongé par le mal, l’auteur entend fonder la résistance des croyants dans leur foi en la victoire de Dieu et de son Envoyé. La victoire est certes promise, mais elle passera nécessairement par un combat et une persévérance.