Vieillir - Aller plus loin
Dans cet extrait, les auteurs retracent la compréhension qu’a développée le philosophe et théologien Augustin (354-430) des différentes tranches d’âge. Ces étapes de la vie sont articulées aux différents niveaux du temps : le temps terrestre et le temps céleste, le temps individuel et le temps collectif.
Deschavanne Eric et Tavaillot Pierre-Henri
» Pour ce qui est de la vie terrestre, Augustin se rallie, contre les comptabilités saisonnières ou hebdomadaires, à une division en six étapes, plus fidèle à ses yeux à l’histoire du salut : les six âges de l’homme correspondent aux six jours de la Création et aux six âges du monde. La petite enfance (
Il n’en va pas de même pour ceux qui sont touchés par la grâce divine. La possibilité leur est offerte de connaître une seconde naissance et d’entamer une autre vie. Celle-ci passe aussi par des étapes progressives qui vont peu à peu éliminer tout ce qu’il y a de terrestre dans l’existence. Ce deuxième homme, Augustin l’appelle « l’homme nouveau » (
En 1997, la Fondation Nationale de Gérontologie établit une charte des droits et libertés de la personne âgée dépendante. Elle décline en 14 articles les points essentiels dont les personnes âgées en grande dépendance peuvent bénéficier. Cette charte débute par une définition de la vieillesse qui énonce que :
« La vieillesse est une étape de l’existence pendant laquelle chacun doit pouvoir poursuivre son épanouissement.
La plupart des personnes âgées resteront autonomes et lucides jusqu’au dernier moment de leur vie. L’apparition de la dépendance, quand elle survient, se fait à un âge de plus en plus tardif. Cette dépendance peut être due à l’altération de fonctions physiques et/ou à l’altération de fonctions mentales.
Même dépendantes, les personnes âgées doivent continuer à exercer leurs droits, leurs devoirs et leur liberté de citoyens.
Elles doivent aussi garder leur place dans la cité, au contact des autres générations dans le respect de leurs différences.
Cette Charte a pour objectif de reconnaître la dignité de la personne âgée devenue dépendante et de préserver ses droits.
ARTICLE I – CHOIX DE VIE
Toute personne âgée dépendante garde la liberté de choisir son mode de vie.
Elle doit pouvoir profiter de l’autonomie permise par ses capacités physiques et mentales, même au prix d’un certain risque. Il faut l’informer de ce risque et en prévenir l’entourage. La famille et les intervenants doivent respecter le plus possible son désir profond.
ARTICLE II – DOMICILE ET ENVIRONNEMENT
Le lieu de vie de la personne âgée dépendante, domicile personnel ou établissement, doit être choisi par elle et adapté à ses besoins.
La personne âgée dépendante ou à autonomie réduite réside le plus souvent dans son domicile personnel. Des aménagements doivent être proposés pour lui permettre de rester chez elle.
Lorsque le soutien au domicile atteint ses limites, la personne âgée dépendante peut choisir de vivre dans une institution ou une famille d’accueil qui deviendra son nouveau domicile.
Un handicap mental rend souvent impossible la poursuite de la vie au domicile. Dans ce cas l’indication et le choix du lieu d’accueil doivent être évalués avec la personne et avec ses proches.
Ce choix doit rechercher la solution la mieux adaptée au cas individuel de la personne malade. Son confort moral et physique, sa qualité de vie, doivent être l’objectif constant, quelle que soit la structure d’accueil.
L’architecture des établissements doit être conçue pour répondre aux besoins de la vie privée. L’espace doit être organisé pour favoriser l’accessibilité, l’orientation, les déplacements et garantir les meilleures conditions de sécurité. «
Pour lire la charte en sa totalité :
http://www.famidac.fr/article94.html
Le théologien protestant Jean-Daniel Causse parle de responsabilité qui lie parents et enfants. Il souligne que cette responsabilité engage les ascendants envers leurs descendants. Ces derniers n’ont pas de dette à payer à leurs parents, mais une dette à transmettre. Le théologien Jean-Daniel Causse distingue ainsi la dette » imaginaire » de la dette » symbolique » :
» Il y a une autre façon de penser la dette – que j’appelle ici dette symbolique -, qui ne consiste pas à solder la dette en remboursant, en reversant quelque chose à l’ascendance (sur ce plan, la dette est impayable). Il ne s’agit pas de rendre ce que l’on a reçu – telle est la mauvaise dette -, mais de le verser devant soi. Pour le dire autrement, la dette symbolique signifie simplement la chaîne de la vie qui représente pour nous une dette que nous ne pourrons jamais payer, sinon en donnant la vie à d’autres (et il y a bien des manières de vivre ce don). Ce n’est pas rendre le don de la vie dont il est question, mais le donner à son tour selon une logique de la génération qui toujours descend, mais qui ne remonte jamais. On ne peut pas rendre ce que l’on a reçu et on n’a pas à le rendre. On peut seulement le donner à son tour. On peut verser devant soi, vers la génération d’après, ce qui a été reçu. Le mouvement du recevoir au donner va toujours vers l’avant et pas vers l’arrière. L’endettement originaire fonde ainsi une responsabilité. Il engage à utiliser ce qui a été reçu pour sa propre vie et pour la vie d’autres que lui-même.
Ainsi, honorer père et mère, c’est recevoir d’eux – parfois malgré eux – le pouvoir de les quitter. C’est l’enjeu de la transmission. Je note simplement pour terminer un point étymologique : » honorer » se dit en hébreu kibbéd qui signifie « rendre lourd, donner du poids ». […] Donner du poids, alourdir ton père et ta mère prend sens lorsque l’on sait que ceux-ci peuvent faire peser sur les épaules de leurs fils des poids qui ne sont pas les leurs. Il s’agit d’alourdir père et mère, c’est-à-dire pour le fils de ne pas porter à leur place une charge qui n’est pas la sienne. C’est l’honorer que de se décharger un peu de la culpabilité, de la peine, de la gloire, de la richesse de l’ascendance pour inventer sa propre manière d’être. Une variante du précepte, en Lévitique 19,3, parle plutôt de craindre son père et sa mère. Ce texte introduit une nuance de respect et de distance qui complète l’idée de donner du poids. Daniel Sibony écrit en ce sens : « Les respecter pour pouvoir s’en éloigner. Cela ne veut pas dire les laisser tomber – ce serait les prendre pour un déchet et ne leur accorder aucun poids. Il s’agit d’ouvrir un jeu de distances. Cette Parole élabore une certaine séparation, grâce au « respect » (…). Le respect apparaît comme condition de l’entre-deux mouvementé où l’origine bifurque ». Ainsi s’articulent le lien et le déliement, l’héritage et la page neuve, l’histoire passée et celle qui est encore à venir, ce qui a été et l’imprévisible de ce qui arrive.
Jean-Daniel Causse »