Protester - Espace temps
C’est en Allemagne, en 1529, qu’on parle pour la première fois de « protestants ». Ce qualificatif est, dans un premier temps, utilisé par les adversaires de la Réforme pour désigner les adeptes de cette dernière. A cette époque, un moine allemand, Martin Luther, commence à repenser l’Eglise et à lui proposer des changements profonds (une véritable « Réforme »). La plupart des princes électeurs (ceux qui élisaient l’empereur allemand) le suivent. L’empereur, Charles Quint, est pourtant un fervent catholique. Après avoir toléré pendant trois ans le mouvement de la Réforme, il convoque une assemblée politique où il ordonne le ralliement inconditionnel à l’Eglise catholique romaine. Les princes s’y refusent, ils « protestent devant Dieu […] ainsi que devant tous les hommes » de leur refus d’admettre un décret qu’ils jugent contraire « à Dieu, à sa sainte Parole, à [leur] bonne conscience et au salut de [leur] âme ». D’où ce titre de « princes protestants », donné à des non-religieux.
Ce quolibet « protestant » comporte aussi le sens littéral de l’adjectif (et plus courant à l’époque) : « proclamer, attester, faire profession ». D’ailleurs, aujourd’hui, certains protestants (de tendance évangélique) reprennent volontiers cette origine du mot en se définissant comme étant des « professants ». Plus d’un siècle après ces événements de 1529, les adeptes de la Réforme tentent de provoquer des changements au sein de l’Eglise catholique romaine. Ils ne cherchent pas la rupture. Pourtant, la rénovation étant impossible à mettre en place, les « protestants » vont se retrouver hors de l’Eglise catholique romaine. C’est alors qu’on parle de protestantisme.
En histoire du christianisme, on parle généralement de Réforme, ou de Réformation, pour désigner le courant religieux suscité par Martin Luther (1483-1546) en Allemagne et, presque simultanément, par Huldrych Zwingli (1484-1581) en Suisse. En fait, ce mouvement s’enracine dans un profond désir de réforme qui se fait déjà sentir depuis quelques temps dans plusieurs pays. Cependant, le terme « Réforme » désigne plus spécifiquement le mouvement qui passe par la rupture avec l’Eglise de Rome et qui reçoit l’aval des autorités politiques des villes ou des Etats impliqués. Les promoteurs de cette Réforme (Luther, ou encore Calvin en France) sont appelés « Réformateurs ».
C’est une découverte de Luther qui est à l’origine du déclenchement de la Réforme : la justification par la foi seule, c’est-à-dire la conviction que Dieu accepte l’être humain tel qu’il est, que Dieu l’aime gratuitement et non en fonction de ce qu’il fait. De cette idée fondamentale (que Luther redécouvre dans la Bible : Romains 3/22-26), découle quantité de nouvelles propositions pour réformer l’Eglise. C’est ainsi que Luther fait débat à l’intérieur de l’Eglise, puis en est excommunié (1520) et enfin banni (1521). Ce n’est que quelques années plus tard que quelques chrétiens se rangeront du côté de Luther en protestant ouvertement.
Aujourd’hui, le protestantisme ne se limite pas aux Eglises directement issues de la Réforme du 16e siècle. Le protestantisme est une appellation plus large.
Le protestantisme est une famille théologique et spirituelle du christianisme, issue de la Réforme du 16e siècle. Les courants composant cette famille sont multiples et se sont, chacun de son côté, séparés de l’Eglise catholique romaine. De ce fait, le protestantisme n’est pas lui-même une Eglise, mais un ensemble d’Eglises. Au cours des siècles, les termes « protestant » et « protestantisme » ne se sont pas limités aux Eglises directement issues de la Réforme (luthériens, zwingliens, calvinistes, etc.). Ils ont servi à désigner des Eglises pré-réformatrices (vaudois, hussites) et des Eglises ultérieures (baptistes, méthodistes, pentecôtistes, etc.). L’Eglise anglicane appartient aussi à ce courant, même si elle se comprend comme une forme médiane entre catholicisme et Réforme.
Aujourd’hui, dans la famille protestante, on pourrait dénombrer environs une quarantaine d’Eglises plus ou moins importantes qui tentent de garder une base commune. Le protestantisme reste l’une des trois expressions fondamentales de la chrétienté contemporaine à côté du catholicisme romain et de l’orthodoxie orientale.