Psaume 22 - Espace temps
Ce qui est fêté à Pourim, c’est le repos des Juifs après la parution du décret autorisant les Juifs à se défendre de leurs ennemis. Ce n’est pas la victoire sanglante qui est au cœur de la fête, mais le souvenir de la délivrance obtenue. C’est aussi le renversement de situation qui est célébré : le peuple Juif est passé du tourment à la joie et du deuil à la fête. Cette fête ressemble d’ailleurs aux fêtes de Carnaval, avec des masques et des déguisements, avec une inversion des rôles et des places sociales, avec des réjouissances et la participation des enfants, avec des échanges de cadeaux et des dons distribués aux pauvres.
Les auteurs du Nouveau Testament reprennent des textes de l’Ancien Testament et y discernent des prophéties concernant Jésus. L’évangile selon Luc (Luc 4,16-21) place dans la bouche de Jésus le texte d’Esaïe annonçant la venue du Messie. Jésus déclare que cette parole est accomplie: il est le Messie dont parlait le prophète Esaïe. D’autres textes de l’Ancien Testament ont été interprétés par des auteurs chrétiens qui, à travers une lecture dite « christologique » (ou « christocentrique »), discernent dans des figures de l’Ancien Testament des « préfigurations » de Jésus. Ainsi, le destin de Joseph (Genèse 37 à 50) est considéré comme une annonce prophétique de la passion et de la résurrection du Christ. Cette lecture christologique de l’histoire de Joseph a largement inspiré les artistes chrétiens. Aujourd’hui, cette lecture est largement abandonnée, car à travers elle on ne regarde et n’apprécie plus les textes de l’Ancien Testament pour eux-mêmes, mais on les instrumentalise dans une lecture orientée.
JOSEPH | JESUS |
Joseph est envoyé par son père et ses frères en Egypte. | Jésus est envoyé par Dieu aux hommes. |
Joseph est trahi et vendu par ses frères. | Jésus est trahi et livré aux autorités. |
Joseph est élevé au rang de « seigneur » en Egypte. | Ce serait une allusion anticipée à la résurrection du Christ. |
Joseph a sauvé son peuple. | Jésus a sauvé l’humanité. |
Dans leur grande majorité, les Pères On dit plus couramment " Pères de l'Eglise ". On désigne ainsi les théologiens des premiers siècles jusqu'aux 7e/8e siècles.* de l’Eglise découvrent le psaume 22 à partir du Nouveau Testament et de la citation du verset 2 du Psaume. C’est le point de départ pour leur commentaire. C’est le cas de Justin Philosophe né en Palestine et mort en martyr à Rome vers 163-167. Il est connu pour ses deux apologies : Apologie pour les chrétiens dans laquelle il présente les grandes lignes du christianisme de son époque ; Dialogue avec Tryphon, dans lequel il veut démontrer la caducité du judaïsme et tente de persuader les juifs d’accepter la vérité du christianisme.* qui utilise dans son ouvrage intitulé Dialogue avec Tryphon le psaume 22 pour affirmer que le Christ accomplit l’Ecriture sur la croix et qu’il est bien le Messie. Ces différentes interprétations alimentent la controverse entre lecture juive et lecture chrétienne du psaume 22. Cette controverse se poursuit au Moyen-âge. Au 2e siècle, la réception du psaume 22 par le christianisme a donné lieu à plusieurs lectures possibles qui mettent par exemple l’éclairage :
- sur la Passion du Christ (sa mort sur la croix) : c’est le cas de Justin dans son Dialogue avec Tryphon 103,7-8.
- sur l’incarnation (Jésus est le fils de Dieu sur terre) : citons Origène Origène est un Père de l'Eglise du 3e siècle dont l'œuvre théologique et exégétique est très importante. Il naît à Alexandrie vers 185.* dans son Traité des principes II,8,1.
- sur la résurrection : Eusèbe de Césarée
Père de l’Eglise, il est évêque de la ville de Césarée en Palestine. Il participe aux controverses contre l’arianisme qui est la doctrine élaborée par Arius et qui nie la divinité de Jésus.* rapproche le verset 27 du psaume 22 et l’image de Jésus comme pain de vie, en référence à l’évangile selon Jean:
Jean 6,35 Jésus leur dit : « C’est moi qui suit le pain de vie ; celui qui vient à moi n’aura pas faim ; celui qui croit en moi jamais n’aura soif ».
La majorité des commentateurs chrétiens du Moyen-Age utilisent le psaume 22 dans leur argumentation. Ils font particulièrement référence aux versets suivants en les mettant en miroir avec le récit de la Passion Du verbe latin "patior" souffrir. La passion de Jésus recouvre le temps de ses souffrances : son arrestation, son jugement, sa condamnation, sa crucifixion et son ensevelissement.* du Christ :
- Verset 2 : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » : ces paroles ont été prononcées par Jésus sur la croix ;
- Verset 7 : l’image de « l’homme-ver » est associée à la naissance virginale de Jésus (au Moyen-Age, on considère que les vers naissent par génération spontanée) ;
- Verset 8 : les moqueries des ennemis du psalmiste sont les moqueries des juifs à l’égard de Jésus ;
- Versets 13 à 19 : ces versets décrivent les différents moments de la Passion et les souffrances physiques de Jésus.
Le psaume 22 sert alors à démontrer que, dès l’Ancien Testament, Jésus est annoncé comme étant le Messie. Les exégètes chrétiens du Moyen âge considèrent que le texte du psaume 22 est à attribuer de façon littérale au Christ. C’est, par exemple, l’opinion de Thomas d’Aquin. Les exégètes juifs refusent les lectures christologiques du psaume 22. Pour eux, le Messie est toujours à venir.
Le psaume 22 décrit des sentiments universels de l’être humain : la détresse, le doute, l’interrogation, la souffrance mais aussi l’espoir, la confiance, voire la joie dans la deuxième partie. Cette prière est valable pour tous les temps et pour toute personne qui est dans la détresse, ainsi chacun peut se l’approprier.
Le fait d’attacher ou de fixer quelqu’un à une croix est un supplice utilisé par l’armée romaine d’occupation en Judée. Dans les textes des évangiles, ce supplice est infligé à Jésus. La croix est ainsi devenue le symbole du christianisme. Les églises et les cathédrales sont bâties en forme de croix.