Conter l’Evangile - Contexte
Rédigé dans les années 80-90, l’évangile de Luc est dédié à un certain Théophile qui semble un personnage important de culture grecque et qui représente peut-être symboliquement les chrétiens d’origine païenne. En effet, Luc parle d’un Evangile Le mot grec veut dire littéralement "bonne nouvelle". A partir de l'empereur Auguste, il désigne l'instauration de la paix romaine. qui s’est progressivement ouvert à tous les hommes. Point de frontière pour la Bonne Nouvelle : elle est pour tous, juif ou grec. Il faut pourtant du temps pour que s’opère cette universalisation de la parole de Jésus. C’est pourquoi, Luc l’inscrit dans une chronologie dont l’évangile est le premier volet et le livre des Actes, le second. Tout est offert en Jésus-Christ, une fois pour toutes, mais c’est peu à peu que la grâce donnée s’ouvre un chemin dans l’histoire et dans le coeur des hommes. La partie la plus originale de cette ouverture progressive est sans doute la montée à Jérusalem (9/, 51–19/, 28) que Luc inaugure par ces mots : « Jésus durcit son visage pour prendre la route de Jérusalem ». Le drame est au bout du chemin et Jésus l’affronte comme la conséquence même de sa prédication. Dès lors, plus il avance, plus il rencontre l’opposition des chefs du peuple. Sa parole n’est pas celle d’un gourou qui fascine et force le genou à plier, mais une parole qui divise (12/, 49-53). Il ne peut en être autrement car le Christ qui s’avance n’a aucun des traits prévus pour un . Seules les brebis perdues entendent parfois sa voix qui assure que le plus petit a un prix infini au regard de Dieu. L’évangile de Luc demande : es-tu de ceux-là ?
Luc 15,3-7 fait partie d’un ensemble de trois paraboles qui toutes construisent leur récit sur l’opposition perdu (versets 4,6,8,9,17,24,32) – retrouvé (versets 4,5,6,8,24,32).
Dans la première parabole, versets 3-7, il s’agit d’une brebis, perdue-retrouvée;
dans la seconde d’une pièce d’argent perdue et retrouvée (versets 8-10);
dans la troisième d’un fils perdu et retrouvé (versets 11-32).
Les deux premières histoires, presque jumelles, insistent sur les efforts déployés pour retrouver ce qui était perdu ; la troisième, plus ample, met le projecteur sur trois personnages (deux fils et leur père) et les pensées et réactions de chacun dans ce jeu du perdu-retrouvé. Dans ce dernier récit, la colère et le refus du fils aîné (versets 28-30) font écho aux murmures et à l’opposition des scribes et pharisiens à l’égard de Jésus (verset 2).
Toutes trois disent l’évidence de la joie des personnages des récits (le berger, la femme et le père) et de Dieu lorsque ce qui était perdu est retrouvé.
A travers ces paraboles, Jésus tente de faire comprendre aux scribes et pharisiens pourquoi il accueille les pécheurs, partage leur table, et transgresse du coup les règles de pureté rituelle. Jésus invite ses adversaires à s’associer à sa joie, à faire la fête avec lui et ceux qui s’approchent de lui, écoutent sa parole et reconnaissent en lui Dieu qui se fait proche, le berger venu pour eux. Les scribes et pharisiens sont appelés à les regarder non plus comme des êtres rejetés mais pardonnés, appartenant désormais au même peuple de Dieu.
L’évangile de Luc offre de nombreuses autres paraboles. Certaines se trouvent également dans l’évangile de Matthieu. C’est le cas de celle que nous étudions. La comparaison des deux mettra en lumière les traits particuliers et intérêts de chacun des évangiles. L’évangile de Thomas, non canonique
Le mot est d'origine grec et signifie à l'origine "baguette" ou "règle de charpentier" et par extension a pris le sens de "règle". Finalement ce mot a désigné une liste ou un catalogue de livres, représentant la règle qui délimite les Ecritures reconnues, et faisant autorité pour la foi juive puis chrétienne., offre lui aussi une version de cette parabole.
Le thème du repas est très important dans les textes des évangiles. Le verbe « manger » se trouve 33 fois dans l’évangile de Luc ! Très souvent, c’est autour d’un repas que Jésus enseigne. Le repas est expression de communion, de joie, de vie.
Il est tout à fait significatif que Jésus choisit le repas de la Pâque
La Pâque est la fête juive qui commémore la sortie d'Egypte sous la houlette de Moïse et la libération du peuple hébreu de la servitude égyptienne. Elle est racontée dans le livre de l'Exode aux chapitres 12 et 13. pour montrer à travers la symbolique du pain rompu et de la coupe partagée à quel point il va se donner pour ceux qui lui appartiennent. Au repas dont parle la parabole, se retrouvent des invités de toute sorte. Ce qui choque les pharisiens et les scribes, c’est que Jésus prononce une invitation qui dépasse tout à fait le cadre du « convenable ». Pour eux, on ne mange pas avec n’importe qui ! Alors que Jésus, au contraire, invite pécheurs et prostituées à sa table !
Le Royaume, cette communion totale avec Dieu à la fin des temps, est encore imaginé comme un grand repas, un festin où tous sont invités. Jésus dit à ses disciples:
Luc 22,30
« Vous êtes, vous, ceux qui ont tenu bon avec moi dans mes épreuves. Et moi, je dispose pour vous du Royaume comme mon Père en a disposé pour moi: ainsi vous mangerez et boirez à ma table dans mon royaume, et vous siégerez sur des trônes pour juger les douze tribus d’Israël. »
Ce sont des lois et rituels qui restaurent l’état de pureté et rendent aptes à la relation à Dieu. Certaines de ces lois, qui touchent tous les domaines de la vie, se trouvent dans le livre du Lévitique (chapitres 11 et suivants). Les pharisiens accordaient une grande importance au respect de ces prescriptions et évitaient tout contact avec ceux qui ne vivaient pas selon ces règles et étaient considérés comme impurs. Pour éviter toute souillure, et devenir eux-mêmes impurs, ils ne mangeaient pas avec ces derniers.