Une trentaine de personnes venues de tous les horizons s’est retrouvée autour de Sophie Schlumberger, pasteur bibliste venu tout exprès de Paris, pour nous aider à lire ensemble la lettre de Paul aux Corinthiens, fameuse lettre de Paul sur l’Eglise comme corps du Christ.
Voici quelques impressions de la journée…
L’EGLISE, UN “CORPS” A REDECOUVRIR
par Edwige Malberg
Grâce à Katharina Schächl, responsable de Théovie, nous nous sommes retrouvés à une trentaine de personnes venues de tous les horizons, autour de Sophie Schlumberger, bibliste, pour lire ensemble la lettre de Paul aux Corinthiens (1 Corinthiens 12) , cette fameuse lettre de Paul sur l’Eglise comme corps du Christ.
L’année dernière, avec Sophie Schlumberger, l’animation biblique avait porté sur le texte de Genèse 4, 1-16 : le crime commis par Caïn sur son frère Abel ; animation biblique dont le titre était : « Qu’as-tu fait de ton frère ? » (cf : mensuel Ensemble juin 2010).
L’animation du 12 février 2011, selon moi, prolonge et fait écho à cette cruciale question : « Qu’as-tu fait de ton frère ? ».
Ce qui caractérise une animation biblique c’est la lecture à plusieurs car :
« On ne lit pas tout seul ».
Nous lisons pour avoir de la compagnie. La lecture est un compagnonnage. Compagnonnage qui prendra tout son sens au moment du repas où nous partagerons le pain fait par Hans M. l’un des participants.
En effet, il est important de décortiquer un texte, quel qu’il soit, à plusieurs, afin d’en faire émerger des significations inattendues et d’ouvrir dans ce texte de Paul rebattu des pistes nouvelles. Les propositions de compréhension se multiplient, se croisent et se fécondent les unes les autres. La confrontation avec des interprétations différentes fait jaillir des étincelles de compréhension plus large, plus riches plus vivante.
D’autre part, dans ce voyage d’exploration, Paul est notre vis-à-vis, notre interlocuteur. Cette lettre qui s’adresse aux Corinthiens de la fin du Ier siècle n’est pas sans enjeu pour nous aussi, aujourd’hui.
Séquences de travail en groupe et synthèses en commun ont alterné harmonieusement.
Quelles ont été les différentes étapes de cette animation biblique ?
Sophie Schlumberger part de la représentation que les participants se font de tel ou tel personnage ou de telle ou telle notion.
Qui est Paul pour vous ?
Qu’est-ce que l’Eglise ?
Chacune, chacun ne peut ainsi que se sentir partie prenante de ce qui va se vivre tout au long de la journée.
Quels sont les 5 mots qui expriment le mieux pour chacun de nous ce qu’est l’Eglise ? C’est à travers un épilogue sur ces 5 mots que nous nous sommes présentés les uns aux autres. L’image qui a été retenue pour illustrer ce qu’est l’Eglise est celle d’un instrument de musique, l’Eglise comme chambre d’écho. En effet, l’Eglise ne résonne-t-elle pas de toutes nos histoires personnelles tissées d’attentes, de déceptions L’épître de Paul nous ouvrira-t-elle à une nouvelle espérance ?
Le travail, après ces préambules de présentation, a pu commencer.
Par un jeu : Avec 8 mots-clés de la lettre de Paul dont 5 relatifs au corps, nous avions à composer, en petits groupes, un court texte.
Le texte de la lettre de Paul avec des mots manquants nous fut ensuite proposé. A deux, nous avons eu à compléter le texte. Similitudes et disparités des propositions qui traduisent nos différences de perception d’un même texte. Cela nous permet de prendre quelque latitude et altitude par rapport à cette lettre.
Ces deux approches ayant pour but d’introduire du jeu dans la lecture de la lettre de Paul trop connue afin de sortir des interprétations stéréotypées. Enfin, nous nous référons au texte lui-même dans la traduction de la TOB.
Nouvelle étape : des groupes aléatoires sont formés. Nous allons nous livrer à une lecture attentive dans le mot à mot de la lettre du verset 14 au verset 26 pour construire une signification du texte.
Deux questions vont guider notre analyse :
Quels sont les maux dont souffre le corps ? Il nous est demandé de nommer ces maux.
Nous devons également chercher ce que l’apparition du « nous » au verset 23 apporte de nouveau.
Les maux dont souffre le corps
Le corps malade de ne pas être un corps. En effet, ce qui nous est présenté, c’est un corps morcelé, un corps éclaté comme en représentaient les peintres à l’époque cubiste. Un corps constitué d’une somme de parties mais ne formant pas un tout. De surcroît, chacune de ces parties se prétendant un tout. Ce corps n’est-il pas à l’image de la communauté de Corinthe formée de Grecs, de Juifs ?
Ces maux se nomment : autosuffisance. L’autosuffisant déclare : « Je n’ai besoin de personne », l’autre dans cette optique n’existe pas.
On assiste aussi au phénomène inverse : la dépréciation de soi-même avec la négation de sa propre identité pour se conformer à celle d’autrui.
Le « nous » du verset 23
Quant au « nous » du verset 23 : « Ceux que nous tenons pour les moins honorables, c’est à eux que nous faisons le plus d’honneur », il nous est apparu que le pronom « nous » faisait référence à deux instances différentes. Entre ces deux « nous » s’est produit un renversement significatif, un autre regard qui a entraîné une perception nouvelle de la réalité.
Le deuxième temps de notre étude a été de replacer cette péricope dans son cadre ; donc du verset 12 au verset 27.
Quel nouvel éclairage sur le texte cela apporte-t-il ?
Le Christ apparaît au verset 12. Au verset 13, il est question de baptême « dans un seul Esprit en un seul corps ». Le mot « seul » répété nous renvoie à l’injonction de faire un, d’être unis.
Le dernier verset de la lettre couronne tout ce qui précède : « Or, vous êtes le corps de Christ et vous êtes ses membres chacun pour sa part ».
Paul a usé d’une sorte de détour pédagogique pour mettre en relation « corps » et « Christ ». Il y a au verset 18 trois petits mots qui sont, me semble t-il, la clef de tout l’édifice : « selon sa volonté » ; trois petits mots qui sont au cœur du message de Paul.
Œil, pied, main, oreille, tête etc ne peuvent former un corps à eux seuls ; ils vont former un tout que parce que Dieu a disposé chacun des membres selon sa volonté.
Dieu est celui qui donne de l’honneur à ceux qui en manquent. Voilà un Dieu bien différent du dieu des Grecs. C’est sur notre manque essentiel que Christ vient s’enraciner ; chez les Grecs, cette notion de manque est inconnue. On vit dans l’obsession de la perfection ; qui plus est hors de la réalité du corps. Paul, lui n’hésite pas à faire référence au corps du Christ et au corps crucifié.
Comment se réalise le passage de la partie au tout ? La partie ne devient pas totalité pas sa seule volonté. La force unificatrice, c’est le Christ.
Comme les fleuves vont à la mer, cette lettre de Paul débouche sur le chapitre 13 : « Quand je parlerai les langues de hommes et des anges, si je n’ai pas l’amour, je suis un airain qui résonne, ou une cymbale qui retentit… Maintenant donc ces trois choses restent : la foi, l’espérance, l’amour ; mais la plus grande des trois, c’est l’amour. »